Les jours de fidélité à un conseiller bancaire semblent bel et bien révolus. En 2023, il vous faudra probablement vous accoutumer à voir défiler une série de conseillers. Cela n’est aucunement la conséquence d’un caprice de votre part, mais plutôt une répercussion des multiples épreuves que traverse cette profession.
Votre impression que les conseillers bancaires ont une durée de vie limitée dans leurs postes n’est effectivement pas que spéculative. Les statistiques récentes de l’Association française des banques dévoilées en juillet 2023, montrent que le taux de rotation des conseillers bancaires a grimpé à 10,2% en 2022 (contre 7,6% en 2021), avec un nombre de démissions record de 8 400.
Mais qu’est-ce qui pourrait bien rendre cette profession, généralement perçue comme confortable et bien rémunérée, si peu attrayante ?
Une compensation insuffisante
Les syndicats des bancaires s’accordent tous sur une réalité indéniable : les salaires proposés sont un frein majeur pour l’attraction de nouvelles recrues, en particulier en région urbaine. Selon la dernière étude du cabinet PageGroupe, un conseiller bancaire travaillant avec une clientèle de particuliers et comptant moins de deux ans d’ancienneté peut espérer un salaire annuel brut oscillant entre 30 000 et 32 000 euros.
C’est une rémunération bien éloignée des attentes syndicales pour une industrie qui engrange des bénéfices annuels se chiffrant en milliards. Certes, il y a d’autres avantages (bonus annuels, 13e, 14e voire 16e mois, presque 9 semaines de congés annuels, etc.) mais ces derniers sont la plupart du temps réservés aux hauts responsables.
Face à cette situation, les conseillers bancaires n’hésitent pas à se faire courtiser par la concurrence. Comme l’indique Paul-Maurice Aldebert, délégué Sud-Ptt 13 à La Banque postale, au Parisien, “Certains employés choisissent de quitter leur poste pour une nouvelle orientation professionnelle, tandis que d’autres optent pour un transfert vers d’autres réseaux”. Un point de vue corroboré par Laurence Daguzan, experte financière chez Syndex, un cabinet d’expertise au service des représentants des salariés : « En ville, il suffit simplement de traverser la rue pour vérifier si l’herbe est plus verte ailleurs ».
Aurait-on été trompé ?
Au-delà des questions salariales, ces sont les conditions de travail qui pèsent lourd dans la balance. Comme leur intitulé de poste laisse à le penser, les conseillers bancaires considèrent que leur rôle est de fournir des conseils. Seulement, la réalité interne semble beaucoup moins rose.
Le poste de conseiller bancaire n’est plus vraiment ce qu’il était. Un mélange de tâches administratives et de conformité, un peu de relation client, mais surtout un pan commercial de plus en plus imposant qui semble créer un profond dégoût chez les conseillers.
D’une part, on leur presse d’offrir davantage de conseils, tandis que, d’autre part, on les pousse à atteindre des objectifs de ventes de plus en plus difficiles (ouverture de livrets A, souscription de prêts, etc.). Ce qui entraîne une pression sur leur part de rémunération variable, souvent significative dans le mix revenu fixe/variable.
“Ce qui plaît aux conseillers, c’est de travailler en collaboration avec leur client, de trouver des solutions. Certainement pas de se transformer en vendeurs ambulants” confie Paul-Maurice Aldebert au Parisien.
S’ajoute à cette équation complexe, la défiance croissante du public à l’égard des banques. Les conseillers étant perçus comme la première expression physique de l’institution bancaire, ils subissent souvent les foudres des clients mécontents. Selon une étude de la Dares réalisée en 2020, les employés et techniciens des banques et assurances font partie des catégories professionnelles les plus en proie au stress. Au cours des 12 derniers mois, 35% des employés de la banque et des assurances ont déclaré avoir été victimes d’une agression verbale ou physique enveloppés dans un taux moyen de 18% pour les actifs du pays.
Malgré ce tableau plutôt sombre, Maya Atig, directrice générale de la Fédération bancaire française, ne semble pas alarmée. « Le taux d’instabilité dans les métiers de la banque est certes à la hausse, mais reste sous contrôle car il est de 22,6% en moyenne à l’échelle nationale » atténue-t-elle lors d’un entretien avec le Parisien.
Réservez-vous donc à l’idée de voir votre conseiller bancaire changer de manière fréquente. À moins que vous ne succombiez aux sirènes des banques en ligne et autres néobanques.